La Démocratie au Sein d'un Parti Politique

ALORS

Il y a quelque chose qui m'agace depuis des jours : les propos d'Autain, Garrido, Simonnet et de la clique des socio-traîtres identifiés, ainsi que d'une partie des électeurs de gauche et de Mediapart, sur l'absence de démocratie au sein de LFI.

Mais de manière plus générale, j’aimerais répondre sur ce que signifie vraiment la démocratie dans un parti politique.

Les partis évoluent dans un milieu militant souvent dominé par des bourgeois blancs, qui apprécient et maîtrisent les structures “démocratiques”, et savent les manipuler à leur avantage. Au final, ce sont eux qui contrôlent la politique interne lorsqu'il y a des votes, magouillant collectivement pour imposer leur ligne.

Pour moi, le rôle d'un parti de gauche est de proposer une ligne directrice forte et claire, sans la modifier constamment au gré des adhérents et des jeux de pouvoir internes. Si un parti est de gauche un jour, et de droite le lendemain, parce que “les militants l'ont voté”, alors ces militants trahissent l’électorat.

Dans un parti politique, je pense qu'il est essentiel qu’un grand nombre de choses ne soient pas ouvertes au débat.

C’est précisément cette approche qui a permis à LFI de proposer un programme politique cohérent. On ne discute pas du quoi, mais du comment.

En fin de compte, ce sont les électeurs qui votent. Ce sont eux, et eux seuls, qui représentent réellement la population et qui ont la légitimité de trancher.

Et même à ce stade, les biais restent massifs, ce qui se voit... et nous coûte cher.

Je pense que dans beaucoup de contextes, le concept même de “démocratie” est problématique, parce qu’il repose sur l’hypothèse d’une égalité parmi les votants qui, dans les faits, n’existe pas.

W.E.B. Du Bois a écrit des textes remarquables sur les conditions d’une démocratie réelle, qui restent d’une pertinence brûlante aujourd’hui. (Je recommande : c’est l’un des analystes les plus lucides des rapports structurels entre racisme et capitalisme.)

Le vote interne privilégie toujours celles et ceux qui en maîtrisent les codes. Plus le “corps électoral” est biaisé — c’est-à-dire : des gens décident à la place d’autres — plus la démocratie devient un outil de coercition politique, qui donne une légitimité artificielle à une ligne imposée.

Dans un parti politique, ce biais est immense. Qui, dans cette société, a les moyens, le temps, l’énergie de s’engager dans une structure partisane ? Donc, plutôt que “démocratie”, je préfère l’idée d’une proposition politique claire et non négociable. Cela permet de se concentrer moins sur les individus / courants / égos et plus sur les méthodes d’application concrètes.

L’État français devrait aspirer à être aussi démocratique que possible (ce qu’il est loin d’être). Mais les partis, eux, ne sont pas l’État.

C’est exactement ce que donne le Parti communiste version Fabien Roussel : un parti de centre-droit, mais avec des formes de “démocratie interne”. Et ne parlons même pas du fait que, pour beaucoup de gens, “se politiser” n’est même pas une option socialement valorisée. Pour un citadin soc-dem diplômé ou bourgeois, ça fait partie des activités de sociabilisation disponibles.

Quand tu viens avec des exigences du genre “il faut que ce soit plus démocratique”, ça montre juste que tu ne prends pas le conflit au sérieux.

En gros, tu penses que la pureté de ta méthode de lutte est plus importante que les résultats concrets dans la lutte contre le vrai ennemi : les centristes et l’extrême droite.

Et c’est logique : si ton engagement est surtout une forme de sociabilité bourgeoise, tu veux que le militantisme soit agréable, épanouissant, démocratique selon tes critères.

Tu ne milites pas dans l’urgence. Tu ne milites pas pour obtenir des victoires concrètes et rapides. Tu peux toujours temporiser, adoucir, débattre. Tu n’es pas impliqué dans le conflit, comme tu le reconnais souvent toi-même : tu te bats pour les autres. Mais dans ce cas, il faut admettre que dès le départ, il n’y a pas de démocratie, puisqu’en l'absence des personnes concernées, tu décides à leur place.

Ils ne cherchent pas à “accroître la démocratie”, mais à devenir les chefs.

Faut sortir de ça. Vraiment.